Journées d'études "Lectures littéraires, et représentations du monde : Que propose l'écopoétique pour le sujet ? Abandon du pouvoir psychique et interdépendance ? "

CONTACTS

Directrice : Hélène LAPLACE-CLAVERIE

helene.laplace-claverie @ univ-pau.fr   

 

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emilie.guyard @ univ-pau.fr

 

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Ingénieur d'études : 05.40.17.52.88

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Appui à la Politique de Recherche : 05.59.40.72.36

Marie-Manuelle Marcos (marie-manuelle.marcos @ univ-pau.fr)

 

 

 

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Laboratoire ALTER

Université de Pau et des Pays de l'Adour
Avenue du Doyen Poplawski
BP 1160
64013 Pau cedex

 

Journée d'étude "Lectures littéraires, et représentations du monde : Que propose l'écopoétique pour le sujet ? "

organisées par David Diop, Eden Viana-Martin, Nadine Laporte

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La poésie ne vient pas après la science, pour célébrer le triomphe de la raison sur la nature. Elle vient avant la science, lorsque, avec davantage d'humilité, nous reconnaissons que nous devons notre existence au monde que nous cherchons à connaitre.

Cette affirmation de l'anthropologue Tim Ingold (Marcher avec les dragons) invite le spécialiste de littérature à interroger ses pratiques et ses interprétations des textes. Le moment est venu d'aborder le tournant épistémologique du XXIe siècle, qui dessine différemment la relation entre le sujet et l'objet, entre l’énonciateur et les autres utilisateurs des langages.

Le sujet, acteur, créateur[1] et/ou énonciateur ne se conduit-il pas, dans une dynamique de création, en sujet exploiteur ? Cette obsession occidentale pour l'actant ne construit-elle pas une relation de domination qui nie l'énergie vitale du monde ? Nos représentations littéraires peuvent-elles être lues de manière totalement différente, les grands textes ayant pour spécificité de dire, justement, ce que l' époque de leur interprétation pressent ? Quelles actions ( interprétations, fabrique des imaginaires, dénominations, statuts, création des communs) sont-elles à l’oeuvre, ou imaginables  ?

Ces journées d'étude et de partage auront pour objectif de partager ces interrogations.

Plusieurs axes pourront être évoqués :

-Peut-on aujourd'hui lire nos textes littéraires, canoniques ou pas, en remettant en cause la relation sujet/objet ? Instance créatrice/ matière permettant la création et oeuvre créée ? Sujet énonciateur/ objet énoncé?

-A la suite de Daniel Arasse ( Le Sujet dans le tableau, essai  d’iconographie analytique) et de Jean-Yves Pouilloux, ( L’Art et la formule), pouvons-nous envisager la naissance d’un sujet « fidèle par rapport à une conscience permanente de la précarité radicale » ( Jean-Yves Pouilloux ) au moment de la Renaissance, âge de l’affirmation d’une intimité et d’une attention psychique à l’homme dans sa puissance et sa fragilité ?  A quel moment, dans l’histoire des textes et des arts, cette conscience humaniste est-elle devenue prédominante, et pourquoi? Que proposent les textes antérieurs  ?

-Si nous suivons les propositions de Bruno Latour, devons-nous envisager une disparition radicale de l'idée et de la présence même d'un sujet dans nos lectures de textes, et partant dans nos lectures du monde ? Ou bien, au contraire, en suivant Baptiste Morizot, devons- nous envisager la transformation de ce que nous appelons  « objet » ( thèmes, structures, enjeux, engagements, idéologies) en de nouveaux sujets agissants?

-A la suite d’Anne Simon, de quelle manière pouvons-nous envisager, relisant comme elle Merleau-Ponty, le langage comme l’utilisation d’un monde d’entrelacs ? Les textes anciens ou modernes ne réclament-ils pas de notre part, - contemporains lucides sur la relativité de notre importance dans l’ensemble du vivant - une lecture qui montrerait que « le langage humain n’a pas été inventé par les humains : il s’est présenté à eux, il les a traversés. Tout cela à partir de langages corporels, d’écoute et de mimétisme avec les autres animaux […] Les langues humaines ne nous séparent pas de la nature […] Ce sont les emplois qu’on en fait aujourd’hui qui nous en séparent » ( Anne Simon , « Pourquoi l’animal nous a appris à lire », in Un sol commun, lutter, habiter, penser)  

-Quelles conséquences concrètes ces interrogations peuvent elles entraîner sur nos imaginaires, et partant, sur les actions envisageables ? Par exemple, cette nouvelle représentation faciliterait elle, pourrait-elle provoquer la prise en compte juridique, géographique, économique, historique, donc politique des éléments de la nature comme sujets agissants et collaboratifs ? En novembre 2022 à Dakar, Les Ateliers de la Pensée, organisés par Felwine Sarr et Achille Mbembe ont puissamment réfléchi aux "Cosmologies du lien et formes de vie ». Les écrivains actuels, dont, en particulier, Camille de Toledo ( Le Fleuve qui voulait écrire) investissent ce camp nouveau, qui ajuste les formes de vie à tous les sujets actants.

 

Ces journées se feront en hommage à la chercheuse Christine Van Rogger-Andreucci, disparue il y a vingt ans. Etrangement, nos préoccupations d’aujourd’hui peuvent rejoindre ses interrogations sur le début du cubisme, et la poésie mystique de Max Jacob (Max Jacob, acrobate absolu). Relevant les systèmes de transplantation,  d’abandon du moi, de dérision du sujet, de décalage, de refus d’un langage auto-centre et de déstabilisation de la poésie, ses recherches  ouvrent la porte à nos interrogations contemporaines.  De quelle manière les textes peuvent-ils rendre compte de cette réalité  de plus en plus prégnante :  le sujet humain ne crée pas, il est co-créé en collaboration avec  les autres vivants ? 

 

Je suis le coq beurré, je suis la poule tiède,

je suis le lion,

je suis le loup

En robe d’intérieur bleu-vert je suis le paon

je suis la pie […]

je suis le caméléon et le lézard […]

 

Cueillez moi sur le lac : je suis le nénuphar 

( Max Jacob, « Boulinguer », puis « Réponse à Manon »)

 

Bibliographie indicative

Daniel Arasse, Le sujet dans le tableau, essais d’iconographie analytique, éd Flammarion, coll. Champs arts, 1997, 2006, 2021

Judith Butler, La vie psychique du pouvoir, l’assujettissement en théories, éd. Ansterdam, 2022

Michel Collot, Un nouveau sentiment de la nature, éd. Corti, 2022

Camille de Toledo, Le fleuve qui voulait écrire, éd Les Liens qui libèrent, 2021.

Coll. ( Vinciane Despret et alii)  Habiter le trouble avec Donna Haraway, éd. Dehors, 2019

Philippe Descola et Tim Ingold, ( présenté par Michel Lussault), Etre au monde, quelle expérience commune ? Presses Universitaires de Lyon, coll. Grands débats mode d’emploi, 2014

Vinciane Despret, Habiter en oiseau, ed.Actes Sud, coll. Mondes Sauvages, 2019

Vinciane Despret, Autobiographie d’un poulpe et autres récits d’anticipation, ed.Actes Sud, coll. Mondes Sauvages, 2019ud

Cynthia Fleury et Anne-Caroline Prévost ( dir), Le souci de la nature, CNRS éditions, coll. Biblis 2017

Felix Guattari, Les Trois écologies, éd. Galilée, 1989

Temple Grandin, L’Interprète des animaux, éd Odile Jacob, 2006

Tim Ingold Marcher avec les dragons, trad.Pierre Madelin, Bruxelles, éd. Zones sensibles, 2013.

Baptiste Morizot, Les Diplomates : cohabiter avec les loups sur une autre carte du vivant, éd. Wildproject, 2016

Baptiste Morizot, Manières d’être vivant : enquêtes sur la vie à travers nous , éd. Actes Sud, coll. Mondes Sauvages, 2020

Jean Yves Pouilloux, L’Art et la formule, éd Gallimard, 2016

Bruno Latour, Nous n'avons jamais été modernes, essai d’anthropologie symetrique, éd La Découverte, 1991, 1997

Achile Mbembe, La communauté terrestre, éd. La Découverte, 2023

Marin Schaffer ( dir) Un sol commun, Lutter, habiter, penser, éd. Wild Project, coll. Le monde qui vient, 2021

Anne Simon, Une bête entre les lignes. Essai de zoopoétique, éd.Wild project, 2021

Isabelle Stengers, Résister au désastre, éd. Wild project, coll. Dialogue, 2019

Christine Van Rogger- Andreucci, Max Jacob, acrobate absolu, éd.Champ Vallon, 1993.

 

 

Détails pratiques :

Ces journées d’atelier se dérouleront à l’université de Pau et des Pays de l’Adour.

Ce document est un appel à participation. Il ne s’agira donc pas de présenter une communication  scientifique totalement rédigée, mais de proposer, pour chaque chercheur, ses réflexions et analyses en cours sur les questions ( ou l’une des questions ) posées, avant un débat. Les ateliers pourront s’organiser en tables rondes thématiques.

A la fin de ces journées  pourra être envisagée la tenue d’un colloque  en prolongement, en 2025 ou 2026, avec publication d’actes.

Contacts pour les propositions de participation :  ( avant le 20 mai 2024)

David Diop, ALTER, UPPA : david.diop @ univ-pau.fr

Eden Viana-Martin , ALTER, UPPA : eden.martin@univ-pau.fr

Nadine Laporte, ALTER, UPPA : nalaporte@hotmail.fr

 

[1] Il nous faudra bien entendu définir ce que l’éco poétique peut entendre dans le mot «sujet ». Comme hypothèse de départ et de discussions nous pourrions définir ici le sujet en suivant Judith Butler  : « Le terme de sujet circule parfois comme ceux de personne ou d’individu. La généalogie de la catégorie critique de «sujet» suggère néanmoins que celui-ci, plutôt qu’être strictement identifié à l’individu, signifie une instance linguistique, un tenant-lieu, une structure en formation » [….]  le sujet excède la logique du  ou bien ou bien » […] En ce sens il ne saurait étouffer l’ambivalence par laquelle il les constitue. Douloureuse, dynamique et prometteuse, cette oscillation ente le déjà-là et le encore-à-venir est un carrefour […] au coeur de de la capacité d’agir » in, Judith Butler, La vie psychique du pouvoir, l’assujettissement en théories, éditions Amsterdam 1997, 2022, pp. 22-29.